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Un « autre » modèle de valorisation des entreprises (Thierry Houben - Mascot-Consult)

Valeur économique …


A vrai dire, le sujet n’a rien de nouveau, qui est replacé au centre du terrain lors de chaque crise économique. Par contre, le climat actuel ne pousse toujours pas tous les entrepreneurs en herbe, jeunes ou moins jeunes, à franchir le pas et à se lancer dans l’aventure. Dans les problèmes de transmission auxquels nous sommes régulièrement confrontés, on note à coup sûr une timidité excessive de la part des repreneurs à s’engager dans un processus économique nouveau. Psychologiquement, les mentalités des ressources actives du travail ont changé. De producteur net d’efforts il y a quelque cinquante ans, l’« homo economicus » s’est progressivement transformé, de façon prioritaire, en consommateur final. Il remboursera les dettes de consommation par le travail du lendemain, presté le plus souvent en heures de boulot plutôt qu’en challenge d’entreprendre. Le développement passé récent de notre modèle économique de « vaches grasses » a reposé sur une consommation toujours portée en avant au point même de créer, pour les satisfaire, de nouveaux besoins, pas toujours nécessaires à l’accroissement du niveau de vie des populations.


… et valeur sociale


Dans les évaluations d’entreprises, nous faisons le constat que les experts continuent à privilégier les éléments quantitatifs dont il est soi-disant possible, par extrapolation ou de toute autre façon, d’estimer la valeur de l’entreprise. Par contre, on sait très bien qu’une majorité des PME existe, qui ne dégagent ni pour leurs dirigeants, ni pour leurs actionnaires de résultats financiers significatifs. Comment peut-on justifier ou expliquer leur maintien, en dehors de raisons de survie ? Pour cette majorité d’entreprises, il n’y a pas vraiment de valeur financière au sens étymologique. Que peut donc bien justifier l’activité économique de l’immense majorité du tissu entrepreneurial ?
L’Entreprise, une obligation financière ?
La valeur financière, qui sert le plus souvent de base à la fixation d’un prix lors la cession de l’entreprise, s’analyse encore et toujours, toutes choses étant égales par ailleurs, comme le prix d’un investissement dont la valeur actuelle est l’escompte du paiement des flux à récolter dans le futur et du niveau de remboursement du capital investi. Pour faire simple, attendrait-on d’une entreprise qu’elle dégage à l’instar d’une obligation d’Etat, contre un capital investi, le paiement annuel ou semi-annuel d’un coupon et le remboursement, au terme de l’opération d’investissement, du montant du capital investi ? De telle sorte que le repreneur intéressé par la continuité de l’activité puisse calculer en exactement le prix aujourd’hui d’une entreprise, qui lui procurera demain et après-demain, les recettes attendues qui auront justifié l’investissement.
La valeur de l’entreprise ne serait donc, au sens de l’obligation d’Etat, qu’un investissement en capital qui doit dégager, chaque année, le rendement fixé du capital investi ? En fait, si on s’inspire de ce modèle, on est en droit de se poser d’emblée la question de savoir combien de temps la machine économique sera habilitée à générer ces flux financiers attendus. En fait, on le sait, les modèles concernés se basent à peu près tous sur l’espérance des gains futurs sur une longue période de temps et certainement pas à court terme.


Infaillibilité de l’Actualisation ?


Nous n’avons jamais critiqué et nous recourrons couramment, d’un point de vue quantitatif, à l’utilisation des méthodes mathématiques actuarielles. Celles-ci nous permettent de chiffrer, dans le référentiel d’aujourd’hui, la valeur estimée des flux futurs. Mais, toutes scientifiques qu’elles soient, ces méthodes intègrent, quand on y recourt, l’utilisation d’un taux d’intérêt, représentant somme toute la rémunération - c’est-à-dire le loyer - du capital investi au cours de la période en question. C’est sans doute ici que la méthode peut être critiquée. Rigoureuse, certes, par le recours à la science de la Mathématique, mais très estimative par rapport au contexte dans lequel il est fait usage du taux d’actualisation. On accorde « valeur d’évangile » à un taux d’actualisation sur lequel personne ne détient le moindre contrôle. Qui plus est, on se sert de chroniques du passé des taux observés sur le marché pour choisir a priori le taux moyen - dûment pondéré par un certain nombre de facteurs économiques - pour faire tourner la moulinette des flux financiers du futur. En période d’incertitude comme celle que nous traversons, toutes les hypothèses de validation des paramètres semblent être fortement mises à mal.


L’aléa des prévisions économiques


Et quand bien même les paramètres seraient stables dans une période économique sans trop de remous, peut-on purement et simplement assimiler une entreprise, riche des ressources humaines qui la font avancer, à un simple investissement générateur de cash, devant rapporter un certain rendement à son propriétaire ou son repreneur éventuel ? La démarche est tellement vraie que se pose en chaque occasion la question de savoir quelle période caractérise au plus justement l’entreprise et son activité. On sait, de surcroît, que les prévisions économiques, élaborées par les meilleurs économistes, sont presque toujours démenties, y compris sur le court terme. Qu’un plan d’affaires soit indispensable pour se donner les outils d’un pilotage intelligent des affaires est certes une bonne pratique, mais combien de plans, dont les hypothèses de travail semblaient des plus exactes, n’ont jamais été atteints ?


Voir les choses autrement


Il est sans doute nécessaire de considérer sous un autre angle la situation des entreprises et la valorisation qu’on en fait. Les méthodes financières, faisant appels aux techniques quantitatives, ne doivent certes pas être rejetées en bloc. Etant donné que ces méthodes sont sujettes à un environnement toujours plus incertain, à court comme à moyen ou à long terme, ces méthodes sont beaucoup trop sensibles au choix des hypothèses qui les accompagnent, comme le taux d’actualisation. Il suffit, pour s’en convaincre, de comparer l’évaluation des entreprises à dires d’experts, à celles qui ont fait l’objet de transactions réelles.


Thierry Houben, Managing Partner, Mascot-Consult

Un « autre » modèle de valorisation des entreprises (Thierry Houben - Mascot-Consult)